Résultats 2019 de FCA : rendre l'insoutenabilité séduisante
Submitted by Géry Deffontaines, GERPISA on Mon, 02/10/2020 - 01:00
La chronique hébdomadaire de Bernard Jullien Ancien directeur du Gerpisa, maître de conférences en économie à l'Université de Bordeaux et conseiller scientifique de la Chaire de Management des Réseaux du Groupe Essca.
Rien de très nouveau à la lecture des résultats de FCA : l’Amérique du Nord et les deux marques phare, RAM et Jeep, se portent bien.
Le reste vivote et a plutôt tendance à se dégrader sans que rien de sérieux ne soit entrepris pour y surseoir. Tout se passe depuis 2014 comme si la feuille de route était celle-là : faire tourner la machine à cash aux Etats-Unis et attendre pour le reste que le futur allié se charge soit de faire le ménage soit de réinvestir ou d’offrir ses solutions pour réanimer les marques et le business dans les régions délaissées .
Le reste vivote et a plutôt tendance à se dégrader sans que rien de sérieux ne soit entrepris pour y surseoir. Tout se passe depuis 2014 comme si la feuille de route était celle-là : faire tourner la machine à cash aux Etats-Unis et attendre pour le reste que le futur allié se charge soit de faire le ménage soit de réinvestir ou d’offrir ses solutions pour réanimer les marques et le business dans les régions délaissées .
Le cas de l’Europe est à cet égard emblématique. A.-G. Verdevoye résume bien la situation dans Challenges :
"L'Europe (et le Moyen-Orient qui lui est rattaché) affiche encore une fois une perte. Celle-ci a été certes ramenée de 470 millions en 2018 à 6 seulement l'an passé. Il n'empêche. La région ne représente que 20% du chiffre d'affaires de FCA. Le groupe n'est plus que le huitième acteur en Europe (voitures particulières seules) avec 6% de part de marché en 2019. Une longue descente aux enfers. Produits vieillissants, usines sur-capacitaires, le bilan est faible. "Sergio Marchionne n'aimait pas Fiat parce qu'elle ne gagnait pas assez d'argent avec ses petites voitures", dit un cadre supérieur de la firme turinoise, qui lui reproche un sous-investissement chronique. Le best-seller 500 date de 2007, et Fiat n'a pas remplacé sa vieille petite Punto (2005)."
"L'Europe (et le Moyen-Orient qui lui est rattaché) affiche encore une fois une perte. Celle-ci a été certes ramenée de 470 millions en 2018 à 6 seulement l'an passé. Il n'empêche. La région ne représente que 20% du chiffre d'affaires de FCA. Le groupe n'est plus que le huitième acteur en Europe (voitures particulières seules) avec 6% de part de marché en 2019. Une longue descente aux enfers. Produits vieillissants, usines sur-capacitaires, le bilan est faible. "Sergio Marchionne n'aimait pas Fiat parce qu'elle ne gagnait pas assez d'argent avec ses petites voitures", dit un cadre supérieur de la firme turinoise, qui lui reproche un sous-investissement chronique. Le best-seller 500 date de 2007, et Fiat n'a pas remplacé sa vieille petite Punto (2005)."
On pourrait ajouter qu’il en a été de même de Lancia et que les espoirs que le même Marchionne avait feint de mettre dans le renouveau d’Alfa-Romeo dans son plan de 2014, si loin de ce qu’il a finalement fait, ont été douchés.
Il évoquait alors un objectif de 400 000 voitures vendues en 2018. Il s’en est vendu en 2019 moins de 80 000. Ce ne sont pas les 167 000 Jeeps que FCA a vendu en Europe l’an passé qui peuvent pallier les carences des marques historiques : FCA est en perdition en Europe où ses parts de marché VP sont passées de 6,5% à 6% et remplir les usines italiennes va durablement rester problématique quoiqu’il soit décidé dans l’année à venir par le nouvel ensemble PSA-FCA.
Il évoquait alors un objectif de 400 000 voitures vendues en 2018. Il s’en est vendu en 2019 moins de 80 000. Ce ne sont pas les 167 000 Jeeps que FCA a vendu en Europe l’an passé qui peuvent pallier les carences des marques historiques : FCA est en perdition en Europe où ses parts de marché VP sont passées de 6,5% à 6% et remplir les usines italiennes va durablement rester problématique quoiqu’il soit décidé dans l’année à venir par le nouvel ensemble PSA-FCA.
Comme l’indiquait Florence Lagarde en présentant les résultats du travail conduit par PA Consulting pour positionner les différents constructeurs face aux normes CAFE qui s’appliquent à chacun, FCA est aussi, avec Volkswagen, le constructeur qui semble aujourd’hui le plus loin du compte : entre 2016 et 2018, les émissions de CO2 des véhicules immatriculés sont passés de 120g à 125,4g là où PSA passait de 110,4 à 113,9 ; la cible 2021 de FCA est à 92,8 g, celle de PSA à 91,6.
PA Consulting considère que FCA pourra difficilement descendre en dessous de 120 g alors que PSA serait à même d’atteindre 95,6. Bien évidemment, FCA prétend l’inverse et présente un "plan" d’électrification qui doit lui permettre d’être "compliant" non seulement grâce à Tesla mais encore grâce au lancement de véhicules hybrides rechargeables et électriques à batterie. On peut en l’état actuel des choses nourrir quelques doutes à ce sujet et craindre que les deux années à venir n’impliquent pour FCA en Europe de devoir en rabattre encore en terme de volumes et de profitabilité.
PA Consulting considère que FCA pourra difficilement descendre en dessous de 120 g alors que PSA serait à même d’atteindre 95,6. Bien évidemment, FCA prétend l’inverse et présente un "plan" d’électrification qui doit lui permettre d’être "compliant" non seulement grâce à Tesla mais encore grâce au lancement de véhicules hybrides rechargeables et électriques à batterie. On peut en l’état actuel des choses nourrir quelques doutes à ce sujet et craindre que les deux années à venir n’impliquent pour FCA en Europe de devoir en rabattre encore en terme de volumes et de profitabilité.
En Amérique du Sud, FCA a encore de beaux restes et, malgré le problème argentin, 2019 a permis au groupe de dégager un résultat opérationnel positif (500 millions d’euros) et en nette progression par rapport à celui de 2018. Toutefois, au Brésil où la marque Fiat avait, depuis des décennies, des positions très fortes, celle-ci est désormais en deçà des 9% de parts de marché (là où GM est à 19% et Renault à 9,6%) et doit laisser Jeep assurer le complément. Seuls les VUL assurent à Fiat désormais sa place : avec 40% de part de marché assurées par les Strada et Toro, Fiat continue de peser presqu’aussi lourd que GM et VW. Là encore, ce sont moins les investissements et le dynamisme de la politique produit qui assurent les résultats mais plutôt une stratégie rentière.
Restent l’Amérique du Nord où RAM réalise la totalité de ses ventes et Jeep les deux tiers de celles ci. FCA y réalise 100% de ses résultats puisque les faibles profits en Amérique Latine couvrent à peine les pertes dans les autres régions du monde. La profitabilité y est de 9% et puisque le groupe y fait 68% de son CA et ne dégage pas de profits ailleurs, le résultat du groupe n’est que de 6,2% .
Dans l’arithmétique financière FCA, ceci semble signifier qu’il faut se désengager des autres régions et probablement des marques moins "contributives" pour que la valeur délivrée à l’actionnariat soit plus proche des bons résultats américains de Jeep et RAM. Et, de fait, la gestion du "portefeuille pays" qui a consisté à ne plus rien faire en Europe, en Chine, en Inde ou en Russie comme celle du portefeuille de marque qui a consisté à priver de produits Fiat, Lancia ou Alfa-Romeo, est reproduite à l’identique pour les "sedans" et les marques qui les portent en Amérique du Nord : Chrysler très clairement et Dodge dans une mesure à peine moindre sont en déshérence.
Si Trump ne gagnait pas les prochaines élections et/ou que les grands Etats américains décidaient de faire quelque chose contre la dérive du marché américain vers des produits de plus en plus décalés par rapport à ceux que l’on entend promouvoir en Europe comme ailleurs, FCA et ses "profits cows" seraient très mal en point. Les dirigeants de FCA le savent et se sont organisés pour que l’allié séduit par la profitabilité du groupe à la stratégie insoutenable soit trouvé avant que l’évidence ne s’impose.
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