L'automobile : un symbole pour l'union européenne et ses régulations économiques
La chronique hébdomadaire de Bernard Jullien directeur du Gerpisa.
Avec l’affaire grecque et les réticences allemandes à soutenir une économie malade de sa dette, l’Union Européenne et l’Union Monétaire se voient embarquées dans un débat de politique économique majeur et de plus en plus vif et clair. La "sortie" de Christine Lagarde dans le Financial Times sur la difficulté qu’il y a, pour les autres européens, à suivre les allemands lorsqu’ils érigent leur modèle exportateur en référence pour les autres dès lors que tout le monde ne peut logiquement prospérer sur ce mode en Europe a effleuré la question : la quête de la compétitivité d’une nation en Europe et la pression mise sur les salaires pour la défendre est typiquement "non coopérative" et conduit, collectivement, à la stagnation et non pas à la croissance. Les évocations récurrentes désormais de la voie de l’inflation comme d’une manière possible de dévaloriser les créances pour alléger la charge des emprunteurs montrent elles aussi que l’orthodoxie économique et budgétaire qu’avait installée le pacte de stabilité avait déjà été largement entamée par les mesures de soutien aux économies décidée fin 2008 et début 2009 et que 2010 peut soit prolonger cette remise en cause soit correspondre à un retour à l’orthodoxie.
En effet, en 2010, la reprise n’est pas là et, comme on le sait dans l’industrie automobile, chacun a à craindre que la demande soit largement défaillante sans que les Etats puissent intervenir ni pour soutenir la demande ni pour limiter les dégâts que cela entrainera sur l’offre et l’emploi. La question est alors de savoir si la restauration des comptes publics est un impératif à ce point urgent qu’il faille accepter d’accentuer les difficultés en décidant dès à présent d’augmenter par diverses voies les prélèvements obligatoires ou si, en maintenant une politique monétaire accommodante, en continuant de laisser filer les déficits et en "lâchant sur les salaires", on peut, au prix d’une inflation contenue, faire le pari de la reprise en Europe.
Pour l’industrie automobile, le pendant de la question précédente - qui se pose avec une acuité particulière en France et que Bruxelles pose avec insistance - est celle de savoir si on a laissé la crise faire son travail de "nettoyage" en permettant que s’opèrent les restructurations et les réductions des surcapacités qui permettraient d’aborder la reprise sur des bases assainies. A Bruxelles, du côté de la DG Entreprise, on entend volontiers depuis la fin 2009 que les primes à la casse et la volonté affirmée en contrepartie que les sites d’assemblage ne ferment pas n’a pas permis aux restructurations de s’opérer et que, d’une certaine manière, 2010 doit "servir à cela" : entre la fin des mesures de soutien actives de plus en plus difficile à implémenter et à légitimer pour les Etats et la reprise, il y aurait au fond, dans cette lecture, une "fenêtre", grande ouverte effectivement en ce mois d’avril 2010, pour que s’opèrent enfin la réduction des surcapacités et, donc, les fermetures de sites.
D’autres approches, plus optimistes font, pour le marché européen, des prévisions de croissance fondées sur le sous équipement des ménages dans les nouveaux états membres et sur la nécessité de renouveler les parcs plus rapidement pour les décarboner sur les marchés mûrs qui conduirait d’ici à quelques années à un marché pour les 27 qui flirterait avec les 20 millions. Pour qu’une telle hypothèse soit vérifiée, il faudrait évidemment que, d’un côté comme de l’autre, à l’Est comme à l’Ouest, du pouvoir d’acheter des véhicules neufs et propres soit libéré et que les dispositifs d’incitations et les investissements publics en recherche et en infrastructure soient praticables. Une politique européenne des revenus et une politique industrielle et environnementale coordonnée serait l’outillage naturel dans une telle perspective.
Il y aurait alors tout à perdre à laisser détruire en 2010, des capacités installées depuis longtemps souvent mais depuis peu parfois chez les constructeurs comme chez les équipementiers ou sous-traitants. En effet, la perte des capacités en question et des compétences et tissus productifs associés apparaîtrait à terme comme autant d’occasions perdues de faire face aux demandes des années à venir et d’explications éventuelles d’importations indiennes ou coréennes demain.
Encore une fois, à sa manière, le débat automobile relaie et illustre le débat macroéconomique et si ce statut d’emblème ou de symbole du développement économique et des modalités que les politiques lui donnent est parfois encombrant, il doit être assumé par la profession qui peut peser pour que prévale le choix du développement d’une économie européenne intégrée pour croître et non pas pour organiser entre les nations une concurrence par les coûts à laquelle chacun aura plus à perdre qu’à gagner.
La chronique de Bernard Jullien est aussi sur www.autoactu.com.
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