Quel rôle a joué l’Etat dans l’attraction des FDI, et donc le développement de l’industrie automobile en Slovaquie après 1990 ? Après 1989, les stratégies d’industrialisation (et de restructuration des industries existantes) se sont largement appuyées sur les FDI. Les Etats des PECO se sont mués en « investment promotion machines », dont l’objectif était de créer des conditions favorables pour les firmes multinationales, en particulier celles identifiées comme de grands investisseurs "stratégiques". Menés dans un contexte général d’affaiblissement des capacités des Etats, ces choix les ont placé dans un cercle vicieux, les affaiblissant encore plus, dans la mesure où tous les PECO, caractérisés par leur marché intérieur réduit, leur structure et leur dotation en facteurs concurrentiels comparables, ont cherché à poursuivre la même stratégie. Ceci a permis aux firmes multinationales d’arbitrer entre Etats et d’opter pour les « competition states » offrant les conditions les plus favorables. Cette lutte pour offrir les meilleurs termes aux investisseurs a limité les bénéfices économiques qu’ils pouvaient escompter de ces FDI. L’auteur parle de « corporate capture », telle que les institutions et ressources nationales et locales en viennent à servir les intérêts des multinationales au détriment de la population et du tissu économique indigène. L’Etat fournit par exemple les ressources pour réduire le coût total des investissements privés : infrastructures adaptées, mise à disposition et aménagement de sites greenfield, formations répondant aux besoins des grands investisseurs, donnant à ceux-ci une influence disproportionnée sur les politiques économiques, de formation, qui place leurs intérêts au-dessus de ceux des firmes locales et des habitants. La concurrence régionale pour les FDI, fondée sur un coût du travail bas, une main d’œuvre relativement qualifiée mais flexible et plus docile, rend peu probable la perspective d’une montée des compétences, laissant entrevoir le syndrome des maquiladoras : salaires et productivité faibles, production tournée vers l’exportation, importation des composants à haute valeur ajoutée. L’auteur parle donc « d’économie de marché dépendante » – des capitaux étrangers, des transferts de technologies – fragilisée par la nature de ses avantages comparatifs, et de « développement tronqué » limité à des activités à basse valeur ajoutée, celles à haute VA (fonctions de contrôle, R&D, marketing, politique de "pricing") demeurant dans les pays avancés du cœur géographique. Si ce mode de développement a eu pour effet une forte croissance et une rapide industrialisation, le développement d’un réseau de fournisseurs, dont la colocalisation est impérative, renforçant par ailleurs l’ancrage territorial des investisseurs, les perspectives d’amélioration sont limitées.
La Slovaquie compte désormais 4 grandes usines d’assemblage automobile, et le réseau de fournisseurs associés, essentiellement regroupés à l’ouest du pays. Comment est-elle arrivée à ce résultat ? A la sortie du système communiste, le choix résidait entre l’abandon pur et simple de la production automobile, la focalisation sur la production intermédiaire, ou la recherche d’investisseurs étrangers. Les premières années de transition économique et d’indépendance de la Slovaquie (1993) le pays est peu ouvert aux FDI et la croissance économique faible. C’est à la fin de la décennie 1990, sous la pression de l’UE, du FMI, de la Banque Mondiale, mais aussi stimulé par l’exemple du voisin tchèque (qui mène une politique fiscale agressive : réduction des taux d’impôt sur les sociétés, flat tax, arrangements fiscaux avec les firmes multinationales, et libéralise le marché du travail) que le pays va s’ouvrir aux FDI. La stratégie fixe des objectifs à horizon 2010 en termes d’emploi, de production, visant à l’installation d’au moins une usine d’assemblage automobile, et de fournisseurs, et se base sur une politique d’incitations aux investisseurs étrangers (fiscalité, suppression des barrières douanières). L’Etat s’engage à apporter un soutien financier à l’industrie automobile (aides à l’exportation, à l’emploi, aux restructurations, à la R&D, à la formation, développement d’infrastructures) et se lance dans une politique de recherche d’investisseurs, coordonnées par le Ministère de l’Economie.
Le groupe Volkswagen est le premier à se lancer, d’abord au moyen d’une joint venture avec le constructeur BAZ de Bratislava en 1991, l’acquisition complète étant réalisée en 1994. A cette